La situation de la minorité rom en Tchéquie vue par des étudiants
français
La République tchèque est-elle bien intégrée à l’Union européenne ?
Et quels sont les freins à sa meilleure intégration ? Telles sont les
deux grandes questions que se pose un groupe d’élèves de l’Institut
national des sciences appliquées (INSA) de Lyon. Membres de
l’association Cultures et identités européennes (CUID), quatre
d’entre eux se trouvent actuellement en République tchèque, où ils
tournent un film dans lequel il sera notamment question des problèmes
liés à l’intégration de la minorité rom. De passage à Prague, Marine
Bernasconi et Louise Jeancolas nous en ont dit plus sur leur projet
MB : « Nous sommes tenus dans notre école et notre association de nous
rendre dans les capitales européennes de la culture. Cette année,
c’était donc Mons en Belgique ou Plzeň. Et comme on ne connaît pas
très bien la République tchèque et que c’est une culture différente
de la nôtre, nous avons choisi Plzeň. A partir de là, nous devons faire
un documentaire, et donc développer une problématique autour de la
République tchèque. C’est ainsi que nous avons choisi de travailler sur
les freins à l’intégration de la République tchèque dans l’Union
européenne. Nous cherchons à savoir si elle se sent bien intégrée et
quels sont les éléments qui peuvent coincer son intégration. Nous sommes
donc partis sur la minorité rom et la politique sociale. Mais nous avons
aussi deux autres parties d’abord sur l’histoire et la transition du
communisme à l’UE, et une autre sur l’identité européenne que peut
ressentir un Tchèque. »
-Où en êtes-vous dans l’avancement de votre projet ?
LJ : « Nous sommes actuellement en République tchèque pour dix jours,
à la fois pour tourner toutes les images et commenter à mettre en place
l’idée de notre documentaire. A notre retour en France, il sera temps de
nous occuper du montage, la première projection étant prévue pour le 2
juin à notre école. Ensuite, différentes projections sont également
prévues à Villeurbanne, la ville de notre école. Mais le film restera
disponible pour tous ceux qui le souhaitent. Nous leur enverrons le lien.
»
-Louise, vous vous intéressez plus particulièrement à la question de la
minorité rom en République tchèque. Qu’avez-vous appris sur le sujet ?
LJ : « J’ai découvert énormément de choses. En France, ce que nous
voyons des Roms, ce sont les ghettos et les bidonvilles à côté de chez
nous. On n’en parle rarement et nous avons toujours plus ou moins les
mêmes stéréotypes sur les Roms. Mais quand on s’intéresse au sujet,
on se rend compte qu’il y a beaucoup de choses qui ne fonctionnent pas
aussi en République tchèque. Nous avons appris qu’il y avait un réel
problème au niveau de l’éducation des enfants rom. Ils sont souvent
scolarisés dans des écoles ‘spéciales’, ce qui ne leur permet pas
ensuite d’accéder aux études supérieures. Nous constatons que
l’intégration est vraiment très difficile. Ils recherchent une
reconnaissance qu’ils ont du mal à trouver. Ils veulent partager leur
culture et être reconnus par la majorité de la population tchèque en
tant que personnes avec une culture et une identité qui peuvent être
intéressantes et qu’il ne faut pas rejeter. C’est du moins le message
que les Roms ont voulu nous faire passer. A travers notamment l’art et la
musique, ils veulent être reconnus comme une culture à part entière et
comme une minorité qu’il ne faut pas négliger. »
-S’agit-il, selon vous, d’un sujet difficile à traiter ? Quelles sont
les réponses que vous avez obtenues ?
LJ : « Oui, c’est difficile parce que nous partons avec nos
stéréotypes et nos idées. Or, il faut essayer de s’élever et de
comprendre. C’est un sujet difficile parce que l’on parle de
discrimination, de personnes qui sont exclues socialement, et il y a donc
certaines choses qui ne se disent pas. Certaines personnes préfèrent ne
pas répondre à nos questions de peur que leurs propos soient mal
interprétés. »
-Avez-vous sollicité également les institutions européennes et
certaines ONG internationales qui critiquent la République tchèque
régulièrement pour sa politique d’intégration des Roms qui n’est pas
une franche réussite ?
LJ : « Oui, nous nous sommes adressés à Amnesty International en France
comme en République tchèque. Eux ont des rapports réguliers sur la
situation des Roms et leur éducation. Nous avons rencontré un des
responsables d’Amnesty International en République tchèque qui nous a
expliqué qu’ils s’efforçaient de rencontrer des politiques et de
faire des enquêtes pour pouvoir appuyer leurs arguments. Une de ces
enquêtes devrait d’ailleurs bientôt sortir. »
MB : « Nous avons également rencontré une députée européenne, mais
elle va plus dans le sens des solutions que des critiques. Elle a
travaillé sur le projet de l’éducation des Roms, et elle dit que
c’est compliqué, car il faut beaucoup de fonds pour améliorer les
conditions, avoir des instituteurs qualifiés, etc. Ce n’est pas facile
non plus de faire venir les enfants rom dans les écoles. Ils ont toujours
peur du regard des autres et cela ne fait pas partie de leur culture de
mettre leurs enfants à l’école. Il y donc plusieurs difficultés de ce
type, mais il y a des objectifs qui ont été fixés par la Cour
européenne des droits de l’homme et la République tchèque essaie de
s’y tenir… Mais ce n’est pas évident, et c’est long comme toute
réforme. »
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