Le problème des « écoles spéciales » toujours d’actualité
Un projet d’une association tchèque entend sensibiliser, une fois
encore, au problème de la présence trop importante des enfants roms dans
les écoles dites « spéciales » ou « pratiques », où sont également
scolarisés des enfants handicapés. Si le sujet n’est pas nouveau, cette
fois-ci, c’est aux parents roms eux-mêmes qu’il s’adresse en
priorité.
« Envoyez-le à l’université, qu’il devienne quelqu’un, il a beau
être tsigane, c’est pas un ‘dilino’ » « Dilino », en rom, ça
signifie « idiot ». C’est une bande de quatre jeunes Roms dans le vent
qui entonne ces paroles et rappe à l’unisson pour secouer leurs parents
: ne nous envoyez pas dans les écoles spéciales, inscrivez-nous à
l’école élémentaire pour nous donner un avenir, tel est en substance
le message que délivre ce clip sympathique enregistré non pas en studio,
mais dans une école.
A l’origine de ce projet, l’association pour l’intégration Slovo 21
qui s’efforce entre autre de sensibiliser les parents roms à
l’importance de donner une bonne éducation académique à leur enfants.
Trop souvent en effet, à la fois sous la pression de certains pédagogues
voire même de préjugés intégrés, les parents roms cèdent et envoient
leurs rejetons dans ces écoles dites « spéciales » théoriquement
réservées aux enfants handicapés. Un facteur de désocialisation qui a
des conséquences lourdes sur l’avenir de ces enfants. Ce n’est
pourtant pas le cas de tous, comme cette bande de copains rappeurs que
leurs parents ont envoyé à l’école élémentaire. Des jeunes qui en
veulent, comme Lukas, qui aspire à entrer plus tard dans une école de
musique :
« Les autres enfants au CE2 n’étaient pas sympa avec moi. Je voulais
leur montrer que je savais faire quelque chose. Quand je leur ai montré le
clip à l’école, ils n’en revenaient pas ! »
Pour convaincre les parents, et le grand public, de l’intérêt pour la
société de ne pas sortir ces enfants des rails, interviennent dans le
clip des adultes roms comme autant de mentors : une infirmière, une
professeur de chant, un doctorant ou encore le présentateur télé Richard
Samko, une des rares figures de la communauté rom à être visible dans
les médias :
« De nombreux Roms buttent dans la vie lorsqu’ils sont confrontés à
une embûche : ils n’arrivent pas à la surmonter et ensuite leur
existence glisse vers les stéréotypes que l’on connaît et ils ne
s’en sortent plus. »
Et si le message du clip s’adresse d’abord aux parents roms, il n’en
revient pas moins sur le problème de base : l’existence des écoles
spéciales. Pourtant en 2007, la Cour européenne des droits de l’homme
avait condamné la République tchèque qu’elle estimait coupable de
bafouer le droit des enfants roms à une éducation sans discrimination en
les plaçant dans ces écoles. Six ans après ce verdict, rien n’a
vraiment changé en République tchèque : les écoles spéciales existent
toujours et les enfants roms y sont toujours majoritaires, alors même
qu’ils ne souffrent d’aucun handicap.
Pourtant, le gouvernement a adopté une stratégie de lutte contre la
discrimination qui prévoit la suppression pure et simple de ces écoles à
l’horizon 2015. Une date qui a été depuis repoussée à 2017 face,
notamment, aux nombreuses résistances du côté de parents d’élèves et
des équipes pédagogiques qui défendent l’existence de ces écoles
spéciales. Il y a donc encore du chemin à faire pour bousculer les idées
reçues.
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