Du rififi suite au renvoi du directeur de l’Agence gouvernementale pour
l’intégration sociale
La décision du ministre en charge des droits de l’Homme, le
social-démocrate Jiří Dienstbier, de renvoyer Martin Šimáček de son
poste de directeur de l’Agence gouvernementale pour l’intégration
sociale suscite des remous. Ce dernier considère irrecevables les raisons
avancées pour son éviction et bénéficie du soutien des employés de ce
bureau travaillant notamment les problématiques auxquelles font face les
Roms en République tchèque.
Le nombre de quartiers identifiés comme des territoires d’exclusion
voire des ghettos n’a pas diminué ces dernières années. C’est même
plutôt le contraire, on en recenserait environ 400 pour quelque 80 000
habitants. En coopération avec l’Etat et les communes concernées,
l’Agence gouvernementale pour l’intégration sociale, dont Martin
Šimáček a pris les commandes en février 2009, un an après sa
création, a pour rôle de proposer des solutions pour changer la donne et
aider les populations qui vivent dans ces zones marquées par le chômage,
la pauvreté, l’insécurité sociale, la criminalité, le mal-logement.
Inattendue, l’annonce jeudi dernier du renvoi du directeur de cette
institution a suscité colère et incompréhension, et en premier lieu chez
l’intéressé qui considère sur son blog comme « mensongères et
insultantes » les cinq raisons invoquées par le ministre pour justifier
sa mise à pied. Ces raisons, rendues publiques tardivement, Jiří
Dienstbier les a présentées en conférence de presse ce mardi. Elles se
divisent en deux groupes, le premier ayant trait à des commandes
publiques. On écoute le ministre :
« De façon répétée, de sérieux problèmes dans ce domaine ont été
découverts à l’Agence gouvernementale pour l’intégration sociale. Il
y a eu dernièrement un problème de trop à l’origine de mon initiative
de demander le renvoi de son directeur. Il s’agit d’une commande pour
acheter du temps d’antenne à la télévision pour une somme de cinq
millions de couronnes, TVA comprise (environ 180 000 euros, ndlr). »
Dans le cadre de cette commande, Jiří Dienstbier reproche à Martin
Šimáček de ne pas avoir informé à temps le gouvernement comme la loi
l’y oblige. Une allégation « honteuse » pour l’accusé qui dit avoir
passé l’information très tôt mais n’avoir obtenu un retour que deux
jours avant le début de la campagne télévisée.
Le projet de réorganisation de l’agence constitue le deuxième point
litigieux principal mis en avant par le ministre, selon lequel Martin
Šimáček aurait refusé toute discussion sur le sujet, ce que ce dernier
nie. Sans omettre de mentionner ses réserves sur le plan de séparation en
deux entités distinctes de son institution, lesquelles, indissociables, ne
seraient ainsi selon lui pas fonctionnelles, le futur ex-directeur affirme
même avoir demandé l’organisation de rencontres sur ce thème et
n’avoir reçu pour seule réponse que d’être renvoyé.
Le quotidien Právo fait quant à lui état de « bruits de couloir »,
selon lesquels Martin Šimáček n’était pas en odeur de sainteté
auprès de différents politiciens, et notamment auprès de Martin Klika,
un élu social-démocrate du nord de la Bohême, qui aurait pu jouer un
rôle dans son éviction. Šimáček ne cache pas que son agence et
lui-même peuvent faire l’objet de quelques inimitiés :
« Je sais qu’il existe tout une série de politiciens et également de
membres de ce qu’on pourrait appeler l’élite rom qui étaient agacés
par les efforts de l’agence et de ses employés, qui se sont montrés
aptes à réaliser ce travail dans les localités concernées. Ce sont par
exemple des gens qui étaient auparavant membres du Conseil gouvernemental
pour la minorité rom et qui étaient même parfois liés avec lui d’un
point de vue financier. »
Plusieurs organisations non gouvernementales, dont Člověk v tísni, où
Martin Šimáček avait précédemment travaillé huit années, lui ont
apporté leur soutien. A l’instar d’un certain nombre de maires, toutes
tendances politiques confondues, à la tête de municipalités concernées
par la coopération avec l’Agence gouvernementale pour l’intégration
sociale, laquelle opère actuellement dans 36 localités. Ces élus se sont
liés à la lettre ouverte signée par les employés du bureau, qui disent
désormais craindre pour son avenir.
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