Incident de Břeclav : 2000 habitants de la ville suivent les extrémistes
et manifestent contre les Roms
Avec la région de Šluknov, dans le nord du pays, Břeclav, une petite
ville morave de 25 000 habitants située tout près de la frontière
slovaque et autrichienne est désormais le théâtre de vives tensions
ethniques entre la population non-rom et la communauté rom locale. A
l’origine, un incident survenu à Břeclav à la mi-avril quand trois
agresseurs inconnus, dont un supposé être rom, ont violemment attaqué un
garçon de 15 ans. Pour soutenir la victime et sa famille, mais également
afin de revendiquer plus de sécurité, 2000 habitants de la ville ont
manifesté, dimanche dernier, au centre de Břeclav. Détail important,
c’est le mouvement d’extrême droite Jeunesse ouvrière qui a appelé
à la manifestation. Au-delà des faits, cette affaire de Břeclav est
l’occasion de s’interroger sur la responsabilité et l’objectivité
des médias tchèques…
« Nous ne voulons pas de Tsiganes », «Les Tsiganes au travail », «
Nous sommes ici, où êtes-vous ?», autant de slogans scandés par environ
500 jeunes radicaux venus de tous les coins du pays à Břeclav. Les
messages sur les pancartes ont été tout aussi explicites : « La mairie
dort, pendant que les Tsiganes tuent » ou encore « Stop à la terreur
tsigane ».
Ce rassemblement, suivi par plusieurs centaines de policiers, a surtout
mobilisé les habitants de Břeclav. Si la majorité d’entre eux est
venue exprimer leur soutien au garçon agressé et à sa mère, certains
manifestants n’ont pas pris leurs distances par rapport au discours des
extrémistes :
« Non, cela ne me dérange pas que ce soit une manifestation organisée
par un parti d’extrême droite. De toute façon, c’est la faute du
gouvernement. Qu’il envoie les Roms au travail ! Ils rentreront fatigués
et on sera tranquille. »
Le nombre de Roms qui résident à Břeclav est estimé à 500, mais il
n’existe pas de ghetto rom. Alors que l’incident a été condamné par
de nombreux membres de la minorité, le rassemblement de dimanche dernier a
semé la panique au sein de la communauté rom de la ville :
« Si c’était les gens d’ici qui avaient attaqué le garçon, la
police les aurait déjà trouvé ! Non, c’était des gens venus
d’ailleurs. Ils viennent de l’Allemagne pour trouver de la drogue ici.
»
Ce mercredi, les auteurs de l’attaque contre le jeune homme grièvement
blessé au niveau du foie et des reins, demeuraient inconnus. L’origine
rom d’un des agresseurs n’a été évoquée que par le garçon et la
police ne dispose, semble-t-il, d’aucun autre témoignage. Pourtant,
plusieurs médias internet ont informé, dans les premières heures après
l’incident, d’une attaque brutale de trois Roms contre un garçon à
Břeclav. La directrice du Comité tchèque d’Helsinki, Markéta
Kovaříková, fait partie de ceux qui reprochent aux médias tchèques
d’attiser la haine raciale dans le pays. Elle explique au micro de Radio
Prague :
« Ce n’est pas la première fois que les médias tchèques ont informé
sans vérifier les faits et sans respecter la présomption d’innocence.
Ce comportement est d’ailleurs de plus en plus courant. Récemment, la
chaîne privée TV Nova a diffusé un reportage sur une attaque de Roms
contre une fille dans la région de Liberec. Il s’est avéré ensuite que
cette fille avait menti. Mais le reportage s’est appuyé sur ses propos.
Le problème est que les journalistes n’ont aucune responsabilité. Ils
peuvent écrire ce qu’ils veulent et peu importe si n’est pas vrai. »
La semaine dernière déjà, l’incident de Břeclav a préoccupé les
associations rom et les autorités municipales et régionales. Ces
dernières demandent à l’Etat de renforcer la sécurité dans toute la
région, privée, par ailleurs, d’environ 500 gendarmes suite aux mesures
d’économie. Monika Šimůnková, chargée gouvernementale des droits de
l’homme, a également fait le déplacement à Břeclav. En condamnant
l’attaque, elle a tout de même mis en garde contre l’utilisation dans
cette affaire du principe de culpabilité collective qui vise les Roms.
|