Tensions ethniques en Bohême : le gouvernement tente de reprendre la main
Après déjà quelques semaines de tensions accrues et plusieurs actes de
violence, le gouvernement tchèque essaye de calmer les esprits en Bohême
du nord et veut proposer des solutions concrètes pour éviter les conflits
entre Roms et non-Roms, dans la région et à l’échelle nationale. La
tâche n’est pas simple.
Les habitants de la petite ville de Varnsdorf sur la place principale
chantent d’abord l’hymne national tchèque avant de se diriger vers des
immeubles habités par des Roms : la dernière manifestation de ce type a
eu lieu samedi et heureusement la police était à nouveau présente en
force pour éviter le pire.
Parmi les quelques centaines de personnes à défiler, des crânes rasés
néonazis, mais aussi et surtout des familles et des jeunes, qui se disent
excéder par la « criminalité tzigane ». Les Roms se barricadent chez
eux et regardent la foule par la fenêtre.
Celui qui harangue cette foule est un jeune escroc notoire, Lukaš Kohout,
qui tient à remercier l’extrême-droite pour son soutien. La jeune femme
qui partage sa vie s’est faite arrêter la semaine précédente ; elle
portait pendant la manifestation un T-shirt à la gloire d’Adolf Hitler,
« pour renvoyer les Roms dans les chambres à gaz ».
Le gouvernement tchèque semble désormais avoir pris conscience du
caractère explosif de la situation dans la poche de Šluknov, cette
région située à la frontière allemande et déjà touchée par le
chômage. Le premier ministre Petr Nečas s’y est rendu lundi et des
mesures concrètes doivent être discutées mercredi en conseil des
ministres. Avec notamment un versement des allocations sociales soumis à
de nouvelles conditions :
Petr Nečas: « Nous devons être stricts et le versement des allocations
aux parents doit être lié à la fréquentation de l’école par leurs
enfants. Nous avons le droit de lier ces deux choses. Par ailleurs, à
partir du 1er janvier, la personne qui touche des allocations depuis plus
de deux mois va devoir faire des travaux d’intérêt général si elle
veut toucher la totalité de ses allocations. Il faut qu’il devienne
évident que si on reçoit de l’argent, c’est pour un certain travail.
»
Ces mesures visent la minorité rom, souvent accusée par la population
majoritaire de vivre aux crochets du système et d’être « inadaptable
». Une centaine d’emplois d’intérêt général devrait être crée.
Pour le journaliste rom Patrik Banga, il faut absolument financer cette
création d’emplois, au lieu de dépenser des millions dans les
interventions devenues régulières des forces de l’ordre :
Patrik Banga: « Il faut qu’il existe ce système qui incite les gens à
travailler sous peine de ne plus toucher de prestations sociales. Il n’y
a pas d’autres solutions. Parce que le problème des communautés locales
est qu’il n’y a pas de travail. Il n’y en a ni pour les Roms ni pour
les non-Roms. S’il y avait du travail la situation pourrait au moins
partiellement se régler et se calmer. »
Le chef du gouvernement a également indiqué qu’il faudrait modifier la
législation pour faire en sorte que des hommes d’affaires peu scrupuleux
ne fassent plus de profits en incitant les familles roms à déménager des
grandes villes dans certaines localités comme celles de Bohême du nord.
Dans un pays où 400 ghettos roms ont été répertoriés, politiciens et
ONG s’accordent pour dire que c’est à l’échelle nationale que
doivent être prises les initiatives. A l’échelle européenne également
: le conseil de l’Europe organise d’ailleurs ce jeudi un sommet des
maires à Strasbourg pour discuter de la situation des Roms.
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