Trois sujets que nous avons retenus dans la presse nationale…
Beaucoup de médecins veulent quitter la République tchèque. Les villes
tchèques sont menacées par l’émergence de quartiers défavorisés.
Deux titres, deux sujets que nous avons retenus cette semaine dans la
presse tchèque et dont nous vous présenterons les grandes lignes. Nous
rappellerons aussi, en bref, le discours prononcé par le président de la
République, Václav Klaus, à l’occasion de la fête nationale du 28
octobre.
« Sur près de 13 000 médecins hospitaliers, il y aurait environ 3 500
qui voudraient quitter la République tchèque avant la fin de cette
année, en raison des salaires qu’ils considèrent comme largement
insuffisants. »
C’est ce que l’on peut lire dans une récente édition du quotidien
Pravo, qui se réfère à une déclaration faite par Martin Engel, chef du
Syndicat des médecins - unions des médecins tchèques (LOK-SCL).
Le journal rappelle dans ce contexte l’initiative intitulée « Merci,
nous partons », qui a été lancée l’été dernier afin d’inviter les
médecins tchèques à un départ massif du pays. A ce jour, toujours selon
le chef du Syndicat, cet appel aurait été signé par 40% de l’ensemble
des médecins. Il est soutenu aussi par l’Ordre tchèque des médecins.
Son président, Milan Kubek, a récemment déclaré sur les ondes
radiophoniques :
« Un médecin devrait avoir la possibilité de gagner sa vie dans des
conditions honorables, pour une durée de travail légale. Ce que nous
voulons, c’est que les médecins cessent de dépendre des heures de
travail supplémentaires. »
Le journal Pravo cite en outre le ministre de la Santé, Leoš Heger, qui
ne trouve pas la situation aussi alarmante que cela, et ce en dépit du
fait que, selon l’Ordre des médecins, près de 700 médecins manquent
aujourd’hui dans les hôpitaux tchèques et que ceux-ci doivent embaucher
dans une large mesure des médecins étrangers, venus prioritairement de
Slovaquie ou des pays de l’ex-Union soviétique :
« Si vraiment un quart des médecins signataires de la pétition en
question voulaient partir, cela toucherait considérablement la médecine
pratiquée dans les hôpitaux. Mais, personnellement, je ne pense pas
qu’il y ait lieu de craindre une telle vague de départs. Il est tout de
même vrai que nous n’avons pas beaucoup d’instruments pour répondre
de façon adéquate à cette situation, car, compte tenu de l’austérité
qui nous est imposée, nous ne pouvons pas promettre d’augmentation des
salaires. Mais nous nous efforçons en revanche d’améliorer le système
de formation des jeunes médecins. »
Selon le ministre Heger, il existe des possibilités pour compenser les
départs des médecins, par exemple la réduction des tâches d’ordre
administratif.
Chaque année, plus de deux cents médecins tchèques décident d’aller
travailler à l’étranger. C’est environ un quart de ceux qui terminent
annuellement leurs études de médecine. Ce nombre ne cesse d’augmenter.
L’Allemagne et la Grande-Bretagne sont les destinations privilégiées
des médecins tchèques.
« Les chasseurs de cerveaux allemands convoitent les médecins tchèques
», titrait récemment le site Novinky.cz en annonçant la première tenue
à Prague, en cette fin de mois d’octobre, d’une foire à laquelle une
trentaine d’établissements sanitaires d’Allemagne et d’Autriche se
sont présentés afin de recruter les médecins du pays. Son titre a
d’ailleurs été on ne peut plus éloquent : « Job foire Médecine et
santé 2010 ». Le manager du projet Randolf Kunert a précisé sur son
site :
« Les dirigeants des cliniques allemandes et autrichiennes viennent à
Prague pour offrir aux médecins, aux étudiants et aux anciens étudiants
tchèques, par le biais des contacts personnels, des informations sur les
possibilités et les conditions de travail qui leur sont offertes en
Allemagne et en Autriche ».
Les villes tchèques sont-elles menacées par l’émergence de quartiers
pauvres ? Un article paru dans le journal Pravo répond à cette question
par l’affirmative. Selon son auteur, « tout indique qu’il y aura
bientôt dans les villes tchèques les bonnes et les mauvaises adresses.
Des quartiers riches et sûrs existeront donc à côté de quartiers
pauvres qu’il faudra éviter le soir et la nuit ».
Une telle évolution mettrait définitivement fin à l’époque où
l’on pouvait voir habiter dans un même quartier périphérique une
vendeuse aussi bien qu’un ministre. Le mixage, qui était en quelque
sorte une spécificité tchèque, risque de disparaître effectivement pour
de bon. Dans les pages du journal, nous pouvons lire :
« Les premiers quartiers pauvres et problématiques existent déjà : le
quartier de Chanov à Most et le quartier de Janov à Litvinov, habités
notamment par les Roms, en sont les exemples les plus flagrants. Les
organisations non gouvernementales indiquent qu’il existe en Tchéquie
quelques centaines de localités qui ont tendance à se transformer en
ghettos ».
Ces tendances sont prononcées notamment dans les villes où la
construction des HLM a particulièrement fleuri. Aujourd’hui, les
habitants aisés et surtout les jeunes familles quittent ces quartiers pour
aller vivre ailleurs. Les conséquences de ces départs, qui ont parfois un
caractère massif, sont décrites comme suit :
« Les commerçants quittent les localités dans lesquelles vivent
majoritairement des populations défavorisées et, dans le même temps, les
bons restaurants, les clubs, les bibliothèques et les salles de cinéma
disparaissent au fur et à mesure, car il n’y a plus personne pour y
dépenser son argent. Les magasins classiques sont remplacés par de petits
commerces et des cantines bon marché… Tout ceci continue à approfondir
encore davantage la marginalisation de ces localités. »
Le journal conclut tout de même sur une note optimiste :
« Chaque quartier périphérique n’est pas condamné à devenir un
ghetto pauvre. Mais pour y arriver, il faut que les administrations locales
se comportent dûment, qu’elles développent des activités variées pour
leurs habitants, soutiennent les associations civiques. Le développement
des services locaux, l’édification de parcs, terrains de jeu et de
routes, la sécurité : autant d’éléments importants pour revitaliser
les quartiers périphériques. »
La plupart des quotidiens de ce vendredi ont publié le texte intégral du
discours prononcé le 28 octobre par le président Václav Klaus, à
l’occasion de la fête nationale et qui a d’ailleurs été retransmis
en direct, jeudi soir, par la TV tchèque. Discours dans lequel Václav
Klaus a souligné que « cette fois-ci, il ne voulait pas s’en prendre à
Bruxelles ». En revanche, il a décidé de mettre en garde devant « un
gouvernement globalisé ». Il a dit :
« Les groupes des Etats du monde économiquement et politiquement les
plus forts cherchent à constituer un premier degré informel vers un
gouvernement mondial globalisé. Gouvernement qui sera complètement
dépourvu de toute légitimation démocratique par les citoyens et qui
pourra décider de nos vies sans nous donner la possibilité d’influencer
les choses et d’y participer. »
Selon Václav Klaus, « c’est vers un tel monde que les élites
politiques, économiques et les médias du monde d’aujourd’hui
orientent leurs ambitions ». Et de lancer plus loin un avertissement :
« Tant que l’on ne prendra pas au sérieux ces tendances, tant que
l’on n’ouvrira pas un débat sur les dangers, les risques et les
coûts, il sera trop tard. Dès lors, toute réflexion sur l’Etat
tchèque ne sera qu’une réminiscence historique. »
Selon le chef de l’Etat tchèque, « mener un débat à ce sujet est
notre devoir historique à l’égard des générations futures qui
prendront la relève de l’Etat tchèque ».
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