A Janov, trois mois après les affrontements, la situation reste catastrophique
En novembre dernier, de violents affrontements avaient mis aux prises
plusieurs centaines de partisans de l’extrême droite et la police à
Janov. Dans cette cité de Litvínov, en Bohême du Nord, cohabitent
Tchèques blancs, ou non-roms, et un millier de Tchèques roms. A
l’époque, l’attaque des extrémistes avait mis en lumière la montée
du nationalisme et les problèmes liés à la vie en commun entre la
majorité non-rom de la population tchèque et la minorité rom. Mardi,
soit cent jours après ces événements, le nouveau ministre chargé des
droits de l’homme et des minorités, Michael Kocáb, s’est rendu sur
place. Et à l’issue de cette visite éclair, son constat a été sans
appel. Pour lui, « la situation à Janov est catastrophique ».
Un mois après son entrée en fonction, le ministre chargé des minorités
a été directement confronté à l’un des principaux dossiers de son
ressort : la coexistence et le voisinage pour le moins tendus et même
souvent conflictuels à certains endroits du pays entre habitants roms et
non-roms. Pour Michael Kocáb, il s’agissait de sa première visite dans
son nouveau rôle :
« Je me suis rendu sur place pour me rendre compte de la situation et
mieux comprendre la tension qui existe entre les différentes parties
concernées. Je dois dire que j’ai compris la position défendue par la
municipalité. Je comprends sa fermeté, son intransigeance et qu’elle ne
veuille pas laisser agir les extrémistes, qui ont les faveurs d’une
certaine partie de la population, pour résoudre les problèmes. D’un
autre côté, en tant que ministre chargé des droits de l’homme, il est
également logique que je sois favorable à une approche plus en douceur.
»
Michael Kocáb s’est déclaré agréablement surpris par la faculté des
représentants de la municipalité, des organisations non-gouvernementales
et des associations roms à débattre ensemble. Pour autant, son ministère
est encore dans l’impossibilité de proposer des mesures concrètes qui
permettraient de contribuer à une amélioration de la qualité de vie et
de l’environnement des habitants de la cité de Janov. Or, c’est
justement ce que réclame urgemment la municipalité de Litvínov, comme le
confirme le maire de la ville, Milan Šťovíček :
« Ce qui manque avant tout aujourd’hui est une mesure qui définirait
le nombre maximum de personnes autorisées à vivre dans un même
appartement. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à des situations où
des dizaines de personnes résident au même endroit. Cela complique
énormément la cohabitation dans les immeubles. Ensuite, nous aurions
également besoin d’un changement de la loi réglementant le versement
des allocations sociales. Actuellement, nous ne sommes pas en mesure de
toucher aux allocations des personnes qui ne respectent pas la loi ou qui
ne paient pas ce qui leur est réclamé. Pour les gens honnêtes, c’est
difficile à vivre et très démotivant. En résumé, nous avons besoin de
lois appliquées de la même manière pour tout le monde, y compris pour
ceux qui les enfreignent tous les jours. »
Depuis les affrontements de novembre dernier, la municipalité effectue
quotidiennement des visites de contrôle dans chaque immeuble de la cité
de Janov. Certaines familles, en grande majorité roms, qui ne payaient pas
leurs loyers ont ainsi été contraintes de quitter leurs appartements pour
être relogées dans des centres d’hébergement. Un de ces appartements
vidé de ses occupants a d’ailleurs été symboliquement remis pour un
mois par le maire de la ville au ministre, invitant ainsi le gouvernement
à diriger ses opérations directement sur place. Un geste que n’a
toutefois que très modérément apprécié Michael Kocáb :
« C’est plus une anecdote. Nous sommes allés visiter cet appartement
et je ne suis pas certain que monsieur le maire s’y attendait. Il
s’agit d’un appartement complètement dévasté. Pour le remettre en
état, ce n’est pas un mois de travaux qui serait nécessaire mais bien
plus. Or, l’appartement n’est à notre disposition que jusqu’à fin
mars. Maintenant, j’ai compris le sens de ce geste. Et si l’appartement
intéresse quelqu’un, je veux bien lui prêter. »
Environ 6 000 personnes vivent actuellement dans la cité de Janov,
située dans une ville de Litvínov et une région de Bohême du Nord
durement frappées par le chômage. Un grand nombre de Roms dans des
situations sociales précaires et en provenance de tout le pays y ont été
relogés suite à la privatisation des immeubles de la cité dans les
années 1990, devenant ainsi les voisins d’une population essentiellement
ouvrière pour laquelle la cité de Janov a initialement été construite
dans les années 1970 et 1980.
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